Permettez à celui qui scrute la grande et petite histoire de prendre la parole à l’occasion d’un événement exceptionnel et international dans ce petit coin reculé de la Pévèle : la remise en place de « La Borne ». Je me permets d’abord de saluer cette noble assemblée composée de citoyens français, belges et en même temps européens.
Vous avez sans doute tous entendu ce cri lancé a travers les plaines de France et de Belgique : « On a retrouvé la Borne ! » et nous voilà tous admiratifs, ce matin devant cette pierre, somme toute modeste, mais chargée d’ histoire.
De tout temps les hommes se sont ingéniés à fixer des limites. Et le nom de Camphin en est un illustre exemple puisqu’en latin « Confinium in Pabula » signifiait « les limites des pâturages ». Il y eut les bornes milliaires qui jalonnaient les routes romaines et qui indiquaient les milles romains et qui, comme chacun le sait, faisait 1km480 environ. Il y eut les bornes leugaires qui correspondaient chez les gaulois à une lieue de 2Km 415, et il y eut les bornes frontières.
Et quel est celui qui, aujourd’hui, propriétaire, voire maire, ne tente pas tout pour sauvegarder les limites de ce qu’il croit être son patrimoine ?
Mais, il n’y a pas que les maires qui défendent leur territoire, il y a aussi les Rois et les Présidents. Et certains sont plus pointilleux que d’autres en traçant à l’aide de petits ou de plus gros cailloux ce qu’ils ont appelé les frontières. Guillaume 1er, Roi des Pays Bas de 1813 à 1840, en est un spécialiste. C’est lui qui fit poser ces bornes entre 1819 et 1829, non qu’il envisageait que ses sujets soient bornés, ni qu’il le soit lui-même. Et pourtant il fit poser des centaines de bornes, presque à tous les carrefours, d’ailleurs n’en avons-nous pas découvertes trois autres depuis la réapparition de celle-ci ?
Mais être borné pour un pays, ne veut pas seulement dire : connaître les limites géographiques, Pour les princes comme pour les maires ou les bourgmestres, c’est indispensable pour pouvoir fixer, jusque dans les moindres parcelles, les impôts et les taxes, et là les limites sont très importantes et elles existent toujours alors même que les frontières disparaissent. Il suffit de regarder l’actualité pour se rendre compte de l’importance de se renfermer derrière ces bornes.
En bornant son pays, Guillaume 1er interdisait donc à ce que Lamain soit tendue vers Camphin. (Est-ce pour cela qu’il y a une jambe de bois ?) Il y avait désormais une ligne infranchissable et pendant des lustres des gardiens zélés surveillaient pour que personne ne puisse dépasser les bornes : c’étaient les douaniers dont se jouaient évidemment leurs opposants : les fraudeurs.... et il semble que quelques spécialistes existaient dans ce secteur.
Au Québec un dicton circule : « L’ignorance, c’est comme la science, ça n’a pas de bornes » Peut-être qu’en reposant aujourd’hui cette borne, nous avons fait reculer un peu l’ignorance sur une page d’histoire et par le fait même de faire disparaître une borne... Maintenant, il ne nous reste plus qu’à réaliser ce que disait Alphonse Allais ; « Une fois qu’on a dépassé les bornes, il n’y a plus de limites »
Après avoir tourné autour de « La Borne », passons outre pour retrouver une part des fruits de la récolte fiscale de Mr le maire de Camphin et de son conseil municipal.